Naissance et vie d’un produit star : la baladeur
L’idée se précisa quand Ibuka entra dans mon bureau avec un de nos mini magnétophones stéréo et nos écouteurs de modèles standards. Il n’avait pas l’air satisfait. Il m’expliqua : « j’aime écouter de la musique, mais je ne veux pas déranger les autres… J’ai une solution : me déplacer avec la musique ; seulement c’est trop lourd. »
Je savais pour en avoir fait l’expérience chez moi que les enfants semblent incapables de vivre sans musique. Presque tout le monde a une stéréo à la maison ou dans sa voiture. A New York et même à Tokyo, j’ai rencontré des gens avec des magnétophones ou des radios volumineuses sur l’épaule, la musique jouant a fond. Je me rappelai qu’une fois, ma fille Naoko, de retour de voyage se rua dans l’escalier sans embrasser sa mère. Son premier geste fut de glisser une cassette dans sa chaîne stéréo.
Je demandai à nos ingénieurs de prendre un de nos meilleurs enregistreurs de minicassettes en leur donnant les idées de modifications qui me vinrent à l’esprit. Les écouteurs qui devaient être très légers, se révélèrent la partie la plus ardue du projet.
Je calculai le prix de vente en fonction de l’argent de poche des jeunes, avant même d’avoir construit le premier appareil.
Peu de temps après on m’apporta le premier modèle expérimental de notre création, avec ses minuscules écouteurs, et je fus émerveillé par sa dimension réduite et sa grande qualité de son. Notre tout petit appareil n’avait besoin que de la faible capacité énergétique d’une pile pour amplifier le son des casques ultralégers.
J’étais en voyage quand le nom fut choisi par de jeunes collaborateurs de la compagnie. J’aurai préféré un autre nom comme « walking stéréo » mais ils me dirent qu’il était trop tard, que le programme de publicité était déjà mis en route. L’idée fut réalisée et dès le début, le baladeur remporta un étonnant succès.
Nous eûmes bientôt du mal à suivre le rythme des commandes et il nous a fallut concevoir des chaînes de fabrication automatisées.
Bien sur nous contribuions à augmenter les ventes par une publicité massive : au Japon, nous engageâmes de jeunes couples pour déambuler dans le « paradis des piétons » de Ganza le dimanche, en écoutant leurs baladeurs et en les faisant bien remarquer.
Depuis le premier baladeur sorti de l’usine nous en avons vendu plus de 20 000 000 dans une gamme de plus de 70 modèles différents, nous avons même fait des modèles à l’épreuve de l’eau et du sable et nous en avons d’autres en préparation.
AKIO MORITA (fondateur de Sony)
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